Best shot ever !

Je pourrais te dire que mon séjour à New York commençait gentiment à me gaver. Ou plutôt qu’il se passait sous une pluie chiante comme une belle-mère, sans un match de tennis et sans avoir touché la bille trois soirs de suite à Meatpacking… Je pourrais te raconter mes retrouvailles avec Marat au Pastis, le bar hype de cet ancien quartier de bouchers, entouré des plus belles femmes de Manhattan !

Je pourrais te dire aussi qu’au final, cette journée de dimanche avec une Momie boiteuse et un jeune à l’air dégoûté avait plutôt mal commencé… Que Rodgeur avec une première balle aussi élevée que le QI de Candeloro, un coup droit réglé comme une femme enceinte et un revers que Jakob Hlasek n’aurait pas renié roulait plutôt en mode diesel qu’en super. Mais il aura suffi d’une lueur, d’un signe de Dieu, d’un geste du Maître pour que New York reprenne toute sa dimension et pour que j'hurle ma joie dans un Arthur Ashe Stadium en délire ! Dans ces moments-là je peux te dire que les Ricains font plaisir, ils n’ont pas peur de bousculer trois tasses de thé ou de froisser leur Zadig & Voltaire… Les New Yorkais se lèvent, s'égosillent et en redemandent ! Bref, une étincelle pour mettre le feu et saluer un stade qui est sans aucun doute le central le plus chaud du monde ! Cette étincelle, tu l’as déjà vue 30 fois, l’image est disponible sur tous les sites de la toile, c’est même LE buzz du jour sur Facebook !

«Le plus beau coup de ma carrière», dira ensuite Rodgeur devant 23'000 personnes en admiration. «Le plus beau coup de l'Histoire du tennis», ajouteront d'autres... Le plus beau coup peut-être et surtout, l’avant-dernier point de cette demi-finale dantesque ! Il faut vraiment s’appeler Roger Federer pour sortir un coup pareil en demi-finale de Grand Chelem et s’offrir ainsi trois balles de match ! Il faut être le plus grand joueur de tous les temps pour gérer un match aussi bien, sans trembler ni douter, en élevant simplement le niveau de son jeu au bon moment, au «moneytime» comme ils disent ici. Il faut être un extraterrestre pour disputer sa sixième finale de suite à Flushing Meadows, en quête d’un record qui dépasse l’entendement.

Le Maître a donc renvoyé au vestiaire et à ses études celui qui ne sera sans doute jamais numéro 1 mondial… ou pas avant longtemps. Djokotruite m’a très souvent agacé, mais il faut reconnaître qu’il a été beau, très beau joueur hier. Non seulement il a tenu la dragée haute à Rodgeur, non seulement les deux premiers sets étaient à sa portée, mais il a en plus livré la bataille avec panache et talent. Il y a eu des points fabuleux hier, mais voilà, le Maître tourne à l’heure actuelle et depuis Roland Garros sur une autre planète. Sur SA planète !

Cet après-midi ou ce soir pour toi en Suisse, Rodgeur va donc défier un rookie sans complexe, un grand flandrin surpuissant, une poutre d’Argentine qui sourit aussi souvent que Vladimir Poutine et Lionel Jospin réunis. Qu'on se le dise, Del Puerco est un gros, un très gros client. Mais, aussi impressionnant soit-il, le grand pin de la Pampa jouera aujourd’hui sa première finale en Majeur et c’est toujours un événement difficile à gérer. Saura-t-il résister à la pression, canaliser ses émotions, être prêt à l'heure H ? Réponse très bientôt dans un Artur Ashe Stadium en ébullition ! Comme toi je suppose, je ne tiens plus en place !!

Avant de conclure, je vais quand même féliciter Kim Clijsters pour cette véritable sensation. La Belge a donc remporté l’US Open après deux ans (!) de break pour s’occuper de sa fille. C’est un bol d’air frais pour le tennis féminin, c’est aussi une énorme claque pour toutes les «vedettes» de la WTA – Serena Williams en tête – qui viennent de se faire voler la politesse par une revenante de 26 ans. Le tennis féminin a vécu une année 2009 bizarre, pour ne pas dire infecte, et peut définitivement remercier la sympathique Clijsters et la rafraichissante Wozniacki pour avoir sauvé cette édition de l'US Open. Reste que ce sport fait toujours autant souci et que le show grotesque de la Serena ne fait rien pour arranger le malaise !